La route de Pastoruri – La route du changement climatique
La route du Pastoruri
Après deux jours passés à Huaraz, nous avons déjà hâte de repartir dans les montagnes !
Nous repartons donc avec enthousiasme pour la dernière étape dans la Cordillère blanche avec la route qui relie Huaraz à Huanuco en passant par le glacier Pastoruri. Cette route de terre est très connue des cyclos et nous a été chaudement recommandée ! On a hâte de voir ça !
Le Pastoruri, c’est une montagne avec un glacier. Et ce glacier, comme tous les glaciers du monde, il est en train de disparaître. Alors je ne sais pas trop pourquoi ils ont choisi cette route-là en particulier, mais du coup, cette route s’appelle « la route du changement climatique ».
Mais nous ce qui nous intéresse, c’est que cette fameuse route traverse de nouveau la cordillère en passant encore à 4 900 mètres, au milieu des glaciers ! La route passe presque à la frontière entre la cordillère blanche et la Cordillère Huayhuash, la voisine.
Mais d’abord, il faut longer la route principale sur encore 35km avant l’intersection. Ces 35 km font office de formalité et on les avale vite. À midi, on atteint l’intersection et on s’arrête pour le déjeuner. Il fait beau, on a du fromage, une boîte de thon et du pain dans les sacoches, on se régale ! Aujourd’hui il ne nous reste que 15km de piste tranquille avant le bivouac, ça fait vraiment du bien d’avoir le temps de profiter et d’avoir le temps de prendre son temps ! On lézarde un peu au soleil, on est tous seuls, la route principale est loin, et pour le moment pas une seule voiture n’a emprunté la piste. On commence à voir quelques nuages s’accumuler sur les pics au loin, on décide donc de ne pas trop traîner pour avoir le temps au bivouac.
En me relevant, je sens que quelque chose ne va pas. Je commence à me sentir nauséeux… Je croise le regard de Virginie et je vois qu’elle non plus n’est pas dans son assiette. Au bout de trois ou quatre kilomètres, ça ne va plus du tout…
Hé voilà comment une belle journée tranquille sans nuage avec tous les feux au vert se transforme en moins d’une heure en une journée horrible…
On plante la tente rapidement au bord de la route, heureusement, il faut positiver, les coins de bivouacs ne manquent pas et le paysage reste classe ! On s’écroule rapidement dans la tente, et je vous passe les détails de cette nuit là. Tout ça à cause d’un bout de fromage, même pas vraiment bon. A moins que ce soit le thon qui avait un goût vraiment bizarre ? On ne saura jamais mais quoi qu’il arrive, voici la première intoxication alimentaire du voyage…
Le lendemain, il fait toujours grand beau, le paysage est toujours aussi beau… Mais on est toujours aussi malade… On battra ainsi notre record de distance en une journée : 13 km !
L’altitude n’aide sans doute pas faut aussi le souligner (4200m).
C’est vraiment dommage car le paysage vaut vraiment le coup d’œil… On croise des plantes incroyables qui montent à plus de 6 mètres de haut. J’encourage Virginie à sourire pour les photos, mais décidément, le cœur n’y est pas… Nous sommes moins «malades » mais complètement affaiblis, sans aucune énergie. On fait 3 km, on s’arrête une heure… On fait 5 km, on s’arrête deux heures… Mais heureusement dans notre malheur on est bien, on est seuls, le paysage est splendide, le soleil brille et nous réchauffe.
On décide finalement de planter la tente de nouveau au bord de la route, ça suffit pour aujourd’hui. On se pose aussi des questions… Si demain ça ne va pas mieux, il faudra nous résoudre à faire demi-tour… Il reste encore 12km avant le prochain col à 4800 mètres au pied du Pastoruri, puis encore environ 20 à plus de 4700 avant un deuxième col à près de 4900m. Le tout sans aucune voiture car les touristes s’arrêtent en général juste avant le premier col pour observer le glacier qui disparaît. Donc même si la route n’est pas extrême, il est hors de question de s’y aventurer dans cet état…
La nuit est longue (forcément quand elle commence à 16h!) mais au matin, on sent que ça va mieux. Les nausées ont disparu, nous avons repris quelques forces… Ça va le faire !
Après un gros petit déj, nous voilà sur les vélos, toujours avec le beau temps ! On prend rapidement de l’altitude, et très vite le paysage passe de splendide à majestueux. Les glaciers nous entourent, énormes. Pourtant ici les sommets sont moins hauts que lors de la boucle du Huascaran. Ils sont autour de 5500m. Mais les glaciers sont encore là, bien au rendez-vous. Et le fameux glacier du Pastoruri fait effectivement peine à voir. Il reste à peine un névé.
Une autre route mène au pied du lac glacier, mais nous ne nous sentons pas de faire les 3 km de montée supplémentaires, plus l’heure de marche jusqu’au lac. Nous continuons donc sans nous arrêter.
Nous atteignons rapidement le premier col, nous sommes moyennement en forme mais l’altitude ne se fait pas trop sentir et le paysage compense.
La suite de la route restera gravée dans notre mémoire. 20 km là-haut à deux pas des glaciers, avec des pâturages qui s’étendent à nos pied, les troupeaux de moutons (pas de lamas dans cette partie du Pérou!) et une ou deux bergères qui nous regardent d’un air ahuri pour seul compagnie.
La piste, contrairement à la boucle du Huascaran, est dans un excellent état. C’est un vrai régal de pédaler ici. Entre les deux cols, la route est relativement plate, au dessus de 4800 mètres. C’est rigolo de se dire qu’on pédale au-dessus du Mont-Blanc sans fournir d’effort particulier. On oublierait presque l’altitude. On profite à fond, en sachant qu’hier on était prêts à faire demi-tour… Ouf on a bien fait de continuer, cette route est un bel au-revoir à la Cordillère.
Au fur et à mesure de la journée, les nuages commencent à s’accumuler, et la fatigue aussi. Arrivés au deuxième col, on ne traîne pas et on attaque vite la descente. Au bout de 4 km, on rejoint l’asphalte et on fonce pour arriver à Huallanca (pour ceux qui suivent, c’est le deuxième village qui s’appelle Huallanca où on fera étape!) avant la pluie. Cette descente à un goût particulier. On a l’impression de revenir d’un voyage en apesanteur. Le paysage se transforme rapidement et déjà les pics où nous pédalions il y a quelques minutes semble lointains, brumeux.
Après plus de 30 km de descente et quelques gouttes de pluie, nous voilà à Huallanca où nous trouvons rapidement un hôtel. Et la pluie s’abat sur le village. Ouf !
Quelle journée ! Cette route du Pastoruri nous laissera de tout aussi beaux souvenirs que la boucle du Huascaran. J’ai du mal a réaliser que ce matin on était à 4800m, seuls au monde avec les montagnes au milieu de paysages uniques au monde. Je me sens presque triste, là dans notre hôtel un peu pourri, dans cette ville sans charme.
Et pour cause, les deux prochains jours seront nettement moins marrants, je le sais déjà. Il nous reste 180 km avant Huanuco, la grande ville du coin où nous prendrons le bus pour Lima, puis Cusco. Les billets sont déjà réservés, départ dans deux jours. Donc deux grosses journée qui nous attendent à pédaler dur.
On se console en se disant qu’il n’y a pas de gros col à passer et que pour une fois, on est sur une grosse route donc normalement en bon état.
On ne pouvait pas plus se tromper.
Huallanca – Huanuco – Le Pérou profond
Le matin, les nuages sont déjà là… On ne traîne pas. La descente continue plus ou moins sur 20 km. Et puis…
Boum.
L’asphalte disparaît. Oups ça c’était pas prévu. On se dit qu’il va revenir vite… On se dira ça pendant deux jours.
En fait, c’est assez particulier car on devine qu’il y a quelques temps, il y avait bien de l’asphalte. Et parfois, on peut faire 150 mètres dessus. Il n’est pas si vieux. On a l’impression qu’ils ont complètement décapé la route pour une mystérieuse raison.
Et puis ici, on est vraiment au fin fond du Pérou. Et parfois, il faut l’avouer, on se sent vraiment pas à notre place. Les « Gringos ! » fusent, pas seulement de la part des enfants. Et pas toujours très gentiment. Les chiens sont là, et bien là. Sacrément agressifs. Je n’oublie cependant pas tous les gens et tous les enfants qui nous auront encouragés, salués, souri. Ils restent majoritaires !:)
Il ne pleut pas, mais il fait gris.
Le moral n’est pas au plus haut.
Et les petites montées qu’on avait prévues relativement faciles sont finalement loin d’être faciles. Mais on s’accroche, et on avale les kilomètres, les uns après les autres. Et enfin on arrive en vue de Chavinillo… De l’autre côté de la vallée ! Mais il y a du soleil, le village à l’air super mignon et on se met à rêver d’une bonne bière au soleil !
Là encore, on déchantera vite. Le village vu de près est complètement délabré (comme tout ce qu’on peut voir dans la région d’ailleurs), et rien que trouver un hôtel et un restaurant sera assez difficile comme ça… Encore une journée où on arrive complètement vannés…
Le lendemain, rebelote. Mais cette fois sous la pluie.
Je crois que cette journée restera pour moi la plus dure du voyage. Route de merde, brouillard, pluie, circulation, froid (on est encore à plus de 4000).
Et même la descente sera compliquée et difficile.
Et enfin. Un kilomètres avant Huanuco, la grande ville du coin, on retrouve en même temps le soleil et l’asphalte. C’est un soulagement. Mais malheureusement il nous reste à trouver une compagnie de bus qui ne fera pas trop d’histoires pour emporter les vélos. Dans la première qu’on trouve, après 5 minutes de négociations, un mec nous dit OK. On achète les billets. Alors un deuxième mec nous dit « non non les vélos partiront après vous dans un autre bus ». Et l’autre qui nous avait dit oui, entre temps, il est parti évidemment ! Pour la première fois du voyage je perds mes nerfs. Le pov’ gars a pas dû comprendre grand chose sinon que je l’insultais en français vu que l’espagnol ne me suffisait pas. Mais pour ma défense c’était un vrai gros connard qui se foutait bien de notre gueule.
Virginie prend alors les choses en main, va voir une autre compagnie qui dit oui sans problème. Et miracle on arrive à se faire rembourser les billets. On va donc voir l’autre compagnie (pour ceux que ça intéresse : Turismo Real) qui effectivement ne fera absolument aucun problème pour charger les vélos !
Je vous passe les détails de ces 30 interminables heures de bus cumulées entre Huanuco et Cusco via Lima (où il a encore fallu se battre pour mettre les vélos dans le bus alors que ça ne pose vraiment pas de souci) mais voilà, on y est. A la Estrellita, repère de cyclos, oasis de bonheur avec une vrai boulangerie française juste à côté (sans blague hein!), à deux pas du centre historique de Cusco, cette ville aux allures ultra touristiques, mais, chose incroyable au Pérou, propre et jolie.
Ça fait un drôle de changement pour nous, mais je crois qu’on aura bien mérité un peu de repos et de bonnes choses à manger !
Comment
Ahhhh on ne peut pas gagner à tous les coups… Mais l’un d’en l’autre vous semblez avoir pu quand même tirer la meilleure partie de ce petit cyclotrip d’altitude. Mais effectivement les paysages ont l’air de te vite faire oublier les petits désagréments inhérents aux voyages.
Portez vous bien, gros bisous les loulous!