Le lac Titicaca à vélo par la rive nord
La découverte de l’Altiplano
Après le trek de l’Ausangate, nous profitons de deux jours de repos à Cuzco, le temps de nous reposer un peu et de bichonner nos vélos (premier changement de chaînes!). Les cyclos que nous avions vus à La Estrellita sont quasiment tous partis en direction du lac Titicaca, l’hôtel est plus calme, ça fait bizarre !
Enfin, après deux semaines de pause, nous enfourchons nos montures pour environ huit jours jusqu’à La Paz ! Nous prenons quelques croissants pour la route (cette boulangerie va me manquer, ça me brise le cœur), et en avant ! La sortie de Cuzco est moins pire que ce que l’on pensait, les quinze premiers kilomètres sont vite avalés. Jusqu’à la ville d’Urcos, à 50km de Cuzco, la circulation est assez dense, mais la route est bonne et large. Le relief est presque plat, nous avançons bien plus vite que ce que nous pensions et quand nous nous arrêtons pour le déjeuner, nous avons déjà fait 70 bornes ! Nous avons bien fait de pédaler jusqu’ici, Javier le patron du restau est ravi de nous accueillir, nous prépare un délicieux lomo saltado (émincés de bœuf sautés avec oignons, tomates et poivrons) et discute avec nous et deux autres clients originaires d’Arequipa. Nous finissons cette journée au bout de 100km en évitant les averses, et nous campons au bord de la rivière.
Le lendemain, nous prévoyons d’aller jusqu’à Aguas calientes, pour profiter d’un bon bain chaud pour la deuxième fois en une semaine ! Sur le papier, c’est facile, il y a à peine 70 kilomètres. En réalité, la route plate se transforme peu à peu en faux plat montant, puis en montée. Nous arrivons tôt, mais bien fatigués par cette montée interminable et usante. En route nous croisons une famille, ou devrais-je dire une tribu de Français avec quatre enfants ! Chapeau… C’est aux eaux chaudes que nous rencontrons aussi un couple de Colombiens, Leonardo et Diana, qui sont partis pour un voyage « sin retorno » (sans retour) à travers les Amériques et sans doute le reste du monde.
Nous campons aux Aguas, et là, les mauvaises nouvelles s’accumulent… 1 : l’embout gaz de notre réchaud se visse de plus en plus mal sur notre bouteille (nous pensons que celle-ci n’est pas aussi compatible que ce que les vendeurs voulaient nous faire croire…), nous galérons à l’allumer… 2 : il pleut. Nous nous pensons protégés par notre abri, mais dans la nuit le vent tourne et la tente est trempée au réveil. 3 : l’embout gaz du réchaud est VRAIMENT mort, impossible de faire le petit déjeuner… Et s’il y a une chose que Virginie n’aime pas, c’est être contrariée dès le matin… Je suis donc un peu déprimée, Léo essaie de voir le bon côté des choses, au moins il ne pleut plus. Nous reprenons la route jusqu’au col à 4000m qui marque le début de l’altiplano péruvien. Le mauvais temps de la nuit aura eu l’avantage de saupoudrer les sommets de neige, c’est magnifique !
Les premiers coups de pédale sur l’altiplano sont euphoriques : le paysage est unique, nous sommes à plus de 4000 et pourtant nous ne voyons que des étendues planes autour de nous. La route s’étire juste à côté de la ligne de chemin de fer qui relie Cuzco à Puno. C’est un détail qui importe, car les rails traversent de temps en temps la route. A l’une de ces intersections, Léo me prévient : « Fais attention aux rails hein ! ». Oui oui… Deux secondes après, boum… Je ne comprends pas ce qu’il se passe, je me sens juste tomber sous le poids du vélo, je n’ai pas le temps d’amortir la chute et ma tête heurte le bitume. Pendant quelques secondes c’est un peu la panique, je sens que je n’ai rien mais j’ai surtout peur d’avoir bêtement cassé mon vélo. Finalement, plus de peur que de mal, une des sacoches avant a été un peu abîmée mais rien de plus. Heureusement, j’avais vraiment ralenti avant de passer sur les rails, et j’avais mon casque. J’ai juste été un peu bête de ne pas placer mes roues bien perpendiculaires face aux rails, et ici comme il y a un espace d’une bonne dizaine de centimètres entre les rails et la route, ce genre d’erreur ne pardonne pas.
Le reste de la journée se déroule sans problèmes, je ne suis pas au top de ma forme mais nous trouvons vite un hôtel pour nous reposer. Et comme on dit, demain est un autre jour ! Cela ne pourrait pas être plus vrai, car la journée suivante s’annonce splendide. Il fait beau, la route est plate, nous roulons à 25km/h sans forcer ! Nous retrouvons Leonardo et Diana, mais cette dernière ne se sent pas très bien à cause de l’altitude donc nous comprenons que nous allons vite les semer. En plus de cela, ils ont décidé d’aller jusqu’à la casa de ciclistas de Juliaca, alors que nous pensons couper avant pour rejoindre directement les rives du lac. En effet, nous n’avons pas très envie de nous arrêter à Juliaca vu la description peu glorieuse que les cyclos nous en ont fait, et nous n’avons pas vraiment besoin d’une pause à la casa des ciclistas (mais apparemment, elle est géniale!).
Nous nous engageons donc sur une petite route de terre bien sympa, en plein dans la pampa ! Quand nous rejoignons l’asphalte, nous décidons de continuer un peu. Néanmoins, nous nous apercevons vite que nous avons quitté la pampa, il y a de plus en plus d’habitations et de terres agricoles autour de la route. Nous nous résignons à nous arrêter à une ferme et demandons au propriétaire si nous pouvons planter la tente dans le jardin. Celui-ci accepte et nous propose même une chambre ! Nous refusons, nous ne voulons pas trop déranger non plus et plantons la tente sur le coin de pelouse. Je dois avouer qu’à ce moment-là je suis un peu dégoûtée : quelques heures plus tôt nous étions seuls au milieu de nulle part, et finalement nous nous retrouvons à camper juste au bord d’une route bien fréquentée… Pour couronner le tout, le vent se lève. Léo s’absente quelques minutes puis revient me voir : « Je suis en train de parler au mec, il veut nous faire goûter du fromage, tu viens ? » Ah, pourquoi pas ! Nous nous retrouvons donc au chaud dans la boutique, avec notre hôte qui nous prépare un café et coupe un fromage pour nous. Il nous laisse ensuite pour rejoindre sa famille dans la maison d’à côté, en nous disant bien de manger autant de fromage qu’on veut. Bon… Le fromage ne vaut pas un bon vieux reblochon, mais c’est déjà ça, et surtout c’est super sympa ! Au bout d’un moment on retourne chercher Washington (oui, c’est un nom étrange pour un Péruvien) et on lui demande ce qu’on fait du fromage restant, car on ne va pas le laisser en vrac dans la boutique. On lui demande également combien on lui doit, car on lui a bien mangé un quart du fromage qui doit peser 1kg… Il nous arrête aussitôt « non non, je vous ai invités ! Emmenez le reste, je vous l’offre ! ». Il nous emmène même dans la cuisine, nous dit de faire comme chez nous pour nous faire à manger, et nous redemande encore une fois si on ne préfère pas dormir dans la chambre plutôt que sous la tente car il va faire très froid. Sa gentillesse nous rend presque mal à l’aise, on demandait simplement un coin pour dormir et on se retrouve accueillis comme des rois ! Depuis que nous avons quitté Cuzco, les Péruviens se montrent incroyablement chaleureux et généreux, ils nous laisseront une superbe image de leur beau pays !
Le lac Titicaca à vélo, par la rive nord
Cette fois, c’est la bonne ! Ce matin, nous partons surmotivés pour vivre enfin LE moment fort de cette étape : trois jours de vélo sur le lac Titicaca. Nous avions l’espoir de l’apercevoir hier, mais en fait le terrain est tellement plat que nous ne voyons pas très loin… Pour rejoindre la Bolivie, nous avons choisi de passer par la rive nord (ou Est) du lac. Pourquoi ? La raison est plutôt simple : la rive nord est beaucoup plus sauvage, beaucoup moins touristique, beaucoup plus intéressante selon nous du coup… C’est un choix, nous ne passerons ni par Copacabana, ni par l’Isla del Sol, qui sont les principaux endroits conseillés dans les guides. Sur la rive nord, silence radio. En fait, nous sommes chanceux car ce n’est que depuis le début de l’année qu’un poste frontière a ouvert à Tilali, au nord du lac. Avant, si on voulait passer par le nord, il fallait tout de même aller à la frontière sud pour faire tamponner son passeport. La rive nord est donc encore très peu fréquentée, il faut en profiter car cela va sûrement changer…
Mais c’est bien beau tout ça, mais il faut déjà y arriver, au lac ! Nous pédalons, pédalons, et toujours rien. Nous nous faisons de faux espoirs pendant les montées. « Cette fois, ça y est on va avoir une vue de fou ! » Et non, la vue est encore cachée par des collines… Et puis, au détour d’un virage… Tadaaam, le lac, plus bleu que le ciel (qui est pourtant sans nuages!). On se croit au bord de la Méditerranée, en Grèce ou je ne sais où. A partir de là, la journée devient plus facile, nous sommes tellement heureux d’être là. Une nouvelle surprise nous attend : nous retrouvons Magalie et Mathieu, un couple belge rencontré à Cuzco. Ils étaient partis avant nous mais avaient fait quelques étapes de plus que nous sur la route, donc nous avons fini par les rattraper. Nous pédalons ensemble et trouvons un bivouac parfait au bord du lac. Le lendemain matin, Léo et moi décollons plus tôt, pour sans doute la plus belle partie de cette étape. La route est taillée dans la falaise, ce qui nous permet de progresser tout au bord du lac. Zéro trafic, une route neuve, c’est le rêve ! Nous arrivons tôt au poste frontière du Pérou à Tilali, et pour une fois, en deux minutes l’affaire est pliée, nos passeports sont tamponnées ! La route se transforme en une bonne piste en terre pour rejoindre la frontière officielle, située sur les hauteurs du lac. La vue est encore une fois splendide… Nous continuons la montée, la piste est toujours bonne mais de plus en plus raide. Après une longue descente, nous arrivons à Puerto Acosta au poste frontière bolivien. Ce passage de frontière est le plus simple que nous ayons passé, ça fait du bien d’aller vite dans les formalités !
Le reste de la journée est moins intéressant, car nous sommes plus éloignés du lac, et il nous faut un bon moment pour le rejoindre. Même à ce moment-là, la vue est beaucoup moins spectaculaire qu’auparavant car les rives sont en fait de longues plaines herbeuses ou agricoles. Nous pensons alors que nous avons vu le plus beau côté du lac et que la suite sera moins intéressante. C’était sans compter sur l’apparition de la fameuse Cordillère Royale en arrière-plan, le lendemain ! Notre dernière journée à longer le lac sera donc aussi belle que les autres, avec une portion époustouflante : nous roulons à 40km/h sur un faux plan descendant avec le vent dans le dos, en filant droit vers la Cordillère ! Le soir, nous sommes déjà un peu nostalgiques, le lac Titicaca, c’est déjà fini, et les 50km qui nous séparent de La Paz seront moins excitants…
L’arrivée à La Paz… moins paisible…
Effectivement, nous sommes maintenant sur une autoroute, sans trop de trafic mais pas très intéressante. Nous avons hâte d’en finir. Pour atteindre La Paz, nous devons aller jusqu’au bout de l’altiplano pour arriver à El Alto, en banlieue de la capitale économique. Les cinq derniers kilomètres avant El Alto sont assez particuliers car les habitants bloquent la route depuis des jours. On n’a pas vraiment compris contre quoi ils manifestaient, mais en tout cas ils font ça bien : il y a des barrages de pierres ou de gens assis sur la route tous les cinquante mètres, aucun véhicule ne peut passer. Il faut avouer que cela nous arrange car nous pouvons zigzaguer entre les barrages, et notre arrivée à El Alto se fait donc tout en douceur, sans circulation… Là-bas, nous prenons le téléphérique. Eh oui, La Paz veut former le plus grand réseau mondial de téléphériques urbains (difficile de faire un métro quand tout est construit en pente!). Le téléphérique est flambant neuf, on ne nous pose pas trop de problèmes pour monter avec nos vélos dans les cabines. Prendre ce téléphérique pour descendre à La Paz est une expérience unique, il traverse d’abord la ville (immense!) d’El Alto en survolant les rues, et d’un coup, l’altiplano s’arrête, la pente se fait de plus en plus raide et nous embrassons toute la vue sur La Paz qui s’étend dans la cuvette. Au-delà des toits de briques rouges qui grignotent peu à peu les montagnes alentours, nous apercevons les sommets enneigés de la Cordillère Royale.
Nous sommes bien contents d’avoir pris le téléphérique, car quand nous devons reprendre nos vélos en bas, la situation est telle que nous l’avions crainte : des voitures dans tous les sens, des rues qui descendent pour remonter brusquement quelques mètres plus loin, du monde, du monde, du monde… Heureusement, nous arrivons assez vite à la casa de ciclistas, où notre hôte nous livre un accueil un peu surprenant (difficile de cerner le personnage!), mais nous sommes soulagés de pouvoir enfin nous poser ! Quand nous arrivons, nous sommes seuls, mais très vite la casa se remplit de plein de visages connus : Mathieu et Magalie arrivent également, ainsi que Philip et Niki (rencontrés à Cuzco également!), les frères Nico et Rémi (boucle du Huascaran), nos amis hollandais Jan et Jantien (boucle du Huascaran) et un autre Français, Xavier (croisé avant de repartir de Cuzco). Le monde des cyclos en Amérique du sud est petit 😉
Les deux jours à La Paz passent vite, entre discussions entre cyclos, repos et visites (assez rapides car Léo et moi avons quand même beaucoup de mal à aimer ce genre de ville où tout bouillonne, où on se sent constamment agressés par la foule, la pollution, les voitures…). Mais comme nous allons ensuite nous lancer pour deux grosses semaines de vélo dans des zones désertiques, nous n’allons pas nous plaindre ! (et nous mangeons, mangeons, mangeons, pour être sûrs d’avoir des réserves pour la suite, ahah!)
8 Comments
Au top ce récit, ça fait méga plaisir de vous lire!
Des bisous
Bonjour les amis!
vous nous faites toujours autant rêver, c’est trop bon de vous suivre de trèstrèstrès loin entre un sandwich, un ordi et un cours 😉
La dernière photo de l’article avec le téléphérique au-dessus de la ville est saisissante pour moi qui ai plus l’habitude de voir soit un alpage rempli de crocus, soit un champs de poudre, soit une piste toute raclée par les skieurs.
Vive l’altiplano, vive la pampa, vive la nature!
A bientot
Djé
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Un téléphérique dans une ville… Mais ils sont fou !!
Sympathique en tout cas, paysage bien désertique au top !
Nous n’avons pas eu l’occasion de voir le lac titi caca sous cet angle, d’autant plus que j’ai été malade. Du coup top les photos 😊
Ce sont Loïc et Corinne qui m’ont donné votre site. Voici le notre http://www.teatime-store.fr dans l’onglet miss Teatime en vadrouille!
La bise des sudistes 😉
Salut à vous!
Et bien tant mieux si ça vous rappelle des bons souvenirs! 🙂
On va aller voir votre site merci pour l’adresse !
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Ohhhh ces grands espaces plats ça donne envie d’avaler les KM… Ici le vélo il ne vaut mieux pas y compter! Du coup j’ai hâte de retrouver ma bécane en rentrant sur Lyon! 😉
Grosses bises les copains!